Je me demande ce qui l’avait poussé à prendre cette décision : ce week-end là où je m’étais à peine levée du lit (et accessoirement lavée et brossée les dents), la période ‘bombardante’ de la guerre où mes tenues improvisées et mes cheveux non coiffés me donnaient tantôt des petits airs de Rambo tantôt de petites vendeuses d’oranges, et pendant laquelle mon sale caractère et ma mauvaise humeur l’avaient mis à rude épreuve (mais putain c’était la guerre quoi !). Bref, la phrase que l’on ne veut pas entendre lorsqu’on est en couple et surtout lorsqu’on est heureux dans ce couple tomba :
- Ebony, faut qu’on parle !
- … De quoi ?
- De nous…
- ??? [Eberluée, la bouche qui commence à s’ouvrir et qu’on n’arrive pas à refermer, la tentative de rester sereine et de reprendre ses esprits qui échoue, le ciel qui veut nous tomber sur la tête mais qu’on essaie de retenir, bref, la grosse merde]
- Euh… Je pense qu’on devrait faire une pause…
- Pause de quoi ? [C’est dans ce genre de cas que mon côté ivoirien ressort bien. Pas d’articles, un accent villageois bien prononcé… Chassez le naturel…]
- Pause de nous [Le gars sourit, non mais j’y crois pas. Le sourire au largage ! On aura tout vu dans ce pays !]
- Mais pourquoi ?
- Ecoute depuis quelques temps, je pense à ça. Je n’ai pas envie de te retenir et de perdre ton temps. Tu dois te marier je ne suis pas prêt. Tu veux des enfants je ne suis pas prêt.
- (Donc tu savais tout ça et puis tu es resté pendant un an là ?)….. Ok comme tu as déjà décidé, je peux rien dire. [La dignité doit toujours être préservée, whateverhappens, je n’ai même pas chercher à discuter, à le faire changer d’avis… A quoi bon ?]
- Je suis rassuré que tu le prennes aussi bien. [De l’art de se faire larguer tout en rassurant le largueur].
Quelques heures et quelques larmes plus tard, je raconte ma mésaventure à une copine :
- Mais il est bien hein… Au moins il a eu le courage de te dire en face parce que nos gars d’ici là c’est même pas leur problème. C’est quand tu le vois plus ou bien si tu le vois avec une autre daï* que tu sais que c’est fini sinon… Ils disent pas dèh. Ils font rien avec ça !
- Donc tu veux dire quoi ? Je suis chanceuse quoi ?
- Mais oui kèh… et puis le gar là il est bien. Vraiment c’est un homme bien.
- Affaire de bien. Tu sais ma belle, tu ne m’aides pas du tout là !
- Franchement, je pensais que tu allais me consoler un peu mais là là vraiment, tu n’as rien dit même !
- Comment ça je n’ai rien dit ? Moi je cherche à t’aider puis tu me parles mal ? D’ailleurs même c’est bon même tu penses que tu es la seule à avoir des problèmes… De toute façon même faut que je te laisse !
- Euh…. [De l’art de se faire gbè* par une copine après s’être fait larguée].
Quelques heures plus tard, je roule jusque chez ma mère, histoire d’avoir cette fois droit à une véritable consolation :
- Mais tu sais Manman que S. vient de me demander de faire une pause ?
- Pause de quoi ?
- [######## pffffffffffffff ########] je la fixe méchamment…
- Ah mais c’est pas grave y’a plein d’hommes à Abidjan. Tu vas avoir quelqu’un d’autre. Et puis moi-même il me plaisait pas !
- Mais Maman, est ce que c’est ton mari. C’est pour moi non ? Moi c’est lui que je veux, c’est pas quelqu’un d’autre !
- Donc… Va le prendre ! … [De l’art d’être dégoutée de la vie après s’être fait larguer].
C’est dans ces cas-là que je me sens totalement extraterrestre et incomprise. Le chocolat et les glaces deviennent alors mes seuls alliés et palliatifs. Je devrais dire Youpi parce que mon ex (chéri) a pris la peine de me prévenir avant de me quitter. Je devrais supporter les remarques idiotes (désolée ma chérie) d’une amie mal lunée. Je ne devrais ni montrer mes sentiments ni dire sincèrement ce que je ressens à ma maman, parce que madame est trop pragmatique (terre à terre).
Vie de merde…
E.T. stp viens me chercher...
*
une daï : copine, petite amie.
gbè : virer, couper la parole, se faire fermer le clapet.
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